Zenigata

quand les bananes se plaignent de leur régime

Dans un club de go (1/2)

Dans un club de go on joue, on discute, on rigole, on boit un coup.
On fait surtout la rencontre de joueurs de tous horizons, petits et grands, qui forment des compagnons pour une vie de passions. Mais c’est avant tout un mélange de fortes personnalités, d’attitudes et d’émotions.

Quand on y met les pieds, on y croise d’abord une multitude de petites pierres, tantôt noires, tantôt blanches, parfois volantes, quelques fois sonnantes et trébuchantes. On y croise aussi des goban masochistes (qui se prennent beaucoup de coups), des verres de bière — blonde, brune ou rousse — et surtout les fameux joueurs. D’ailleurs le monde du go se divise en deux catégories : ceux qui réfléchissent et les autres.

Voici la porte d’un club de go typique. À mes risques et périls, j’en franchis le seuil.

Le club est drôlement animé. Déjà une voix me parvient qui domine les autres. Elle est particulière et reconnaissable, parfois forte et moqueuse, d’autres fois aiguë et retorse, c’est celle du kibitzeur. Éminent spécialiste du troll répétitif, il passe plus de temps à commenter les parties voisines qu’à réfléchir à sa propre partie en cours. C’est simple, il parle en permanence.
Conseil : ne rentrez pas dans son jeu. Ne nourrissez point le kibitzeur.

Une revue de partie agitée attire mon attention. Je reconnais le premier protagoniste : il analyse, critique, réprimande, corrige chaque séquence. Pour cela il cite tel honinbo ou montre telle partie connue, un dictionnaire de joseki sur les genoux. Ce joueur, le théoricien, aime à vulgariser son savoir encyclopédique aux joueurs égarés et à corriger toute séquence non orthodoxe. Il ne joue que ce qui figure dans ses livres de référence.
Conseil : en sa présence tâchez de jouer des séquences simples que vous connaissez sinon vous l’aurez sur le dos toute la soirée.

Son interlocuteur n’est autre que son némésis, le bêta-testeur. À l’inverse, lui ne cherche que des coups originaux, des séquences exotiques, l’aventure avec un grand A. Avec lui on compte rarement les points : c’est tout ou rien, blanc ou noir, tué ou être tué. Oubliée la théorie, bienvenus les combats épiques en pur free style.
Conseil : contre lui jouez solide, préférez les séquences simples que vous maîtrisez.

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